Salaire ou droits d’auteur

Cour de cassation, civile, Chambre civile 2, 3 juin 2021, 19-15.250, Inédit
Cour de cassation - Chambre civile 2

N° de pourvoi : 19-15.250
ECLI:FR:CCASS:2021:C200531
Non publié au bulletin
Solution : Cassation partielle sans renvoi

Audience publique du jeudi 03 juin 2021
Décision attaquée : Cour d’appel de Paris, du 15 février 2019

Président
M. Pireyre (président)
Avocat(s)
SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, SCP Rocheteau et Uzan-Sarano
Texte intégral
RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l’arrêt suivant :

CIV. 2

CM

COUR DE CASSATION


Audience publique du 3 juin 2021

Cassation partielle
sans renvoi

M. PIREYRE, président

Arrêt n° 531 FS-D

Pourvoi n° U 19-15.250

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E


AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 3 JUIN 2021

1°/ la société Calliphora, société anonyme, dont le siège est [Adresse 1],

2°/ M. [O] [R], domicilié [Adresse 2],

ont formé le pourvoi n° U 19-15.250 contre l’arrêt rendu le 15 février 2019 par la cour d’appel de Paris (pôle 6, chambre 12), dans le litige les opposant :

1°/ à l’union de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d’allocations familiales (URSSAF) [Localité 1], dont le siège est [Adresse 3],

2°/ à l’Association pour la gestion de la sécurité sociale des auteurs, dont le siège est [Adresse 4],

3°/ au ministre chargé de la sécurité sociale, domicilié [Adresse 5],

défendeurs à la cassation.

Les demandeurs invoquent, à l’appui de leur pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de M. Rovinski, conseiller, les observations de la SCP Rocheteau et Uzan-Sarano, avocat de la société Calliphora et de M. [R], de la SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, avocat de l’union de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d’allocations familiales (URSSAF) [Localité 1], et l’avis de Mme Ceccaldi, avocat général, après débats en l’audience publique du 14 avril 2021 où étaient présents M. Pireyre, président, M. Rovinski, conseiller rapporteur, M. Prétot, conseiller doyen, Mmes Taillandier-Thomas, Coutou, Renault-Malignac, Cassignard, M. Leblanc, conseillers, Mme Le Fischer, M. Gauthier, Mmes Vigneras, Dudit, conseillers référendaires, M. Gaillardot, premier avocat général, et Mme Aubagna, greffier de chambre,

la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée, en application de l’article R. 431-5 du code de l’organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l’arrêt attaqué (Paris, 15 février 2019), rendu sur renvoi après cassation ( 2° Civ., 12 mars 2015, n°1412851), à la suite d’un contrôle opéré par l’union de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d’allocations familiales de Paris et région parisienne, aux droits de laquelle vient l’URSSAF [Localité 1] (l’URSSAF), portant sur les années 2002 à 2004, la société Calliphora (la société) a fait l’objet d’un redressement de cotisations relatif aux « royalties » versées à son président directeur général, M. [R], dans l’exécution d’un contrat de réalisateur artistique conclu entre eux pour la conception et l’enregistrement de l’album « Innamoramento » de [Z] [Y]. Mise en demeure, le 2 janvier 2006, de payer une certaine somme à ce titre, la société a saisi d’un recours une juridiction de sécurité sociale, devant laquelle est intervenu notamment M. [R].

Examen des moyens

Sur le premier moyen

Enoncé du moyen

2. La société et M. [R] font grief à l’arrêt de valider le redressement pour les cotisations des années 2003 et 2004, alors :

« 1°/ que la mise en demeure, qui constitue une invitation impérative adressée au débiteur d’avoir à régulariser sa situation dans le délai imparti, doit permettre effectivement à l’assujetti d’avoir connaissance de la nature, de la cause et de l’étendue de son obligation, afin de pouvoir exercer ses droits et, le cas échéant, contester utilement le redressement objet de la mise en demeure ; qu’à cette fin, il importe que cette mise en demeure précise, à peine de nullité, outre la nature et le montant des cotisations réclamées, la période à laquelle elle se rapporte, sans que soit exigée la preuve d’un préjudice ; que la lettre de mise en demeure qui mentionne à la rubrique « nature des cotisations », « régime général », est insuffisante en ce qu’il n’est pas précisé la nature exacte des sommes réclamées ; qu’en énonçant en l’espèce que « la mise en demeure litigieuse comportait le numéro du cotisant et le service qui l’a émis, l’objet de la mise en recouvrement, la période du contrôle et le montant correspondant à celui figurant sur la lettre d’observations notifiée à la société ainsi que les majorations de retard, qu’elle était accompagnée, d’une part, d’une copie de l’état du redressement, adressé le 22 décembre 2005 au cotisant par lettre recommandée avec accusé de réception et, d’autre part, du décompte récapitulatif portant le détail des années redressées et le cadre du redressement soit « le régime général », qu’elle faisait référence au courrier détaillé et argumenté adressé par la société le 14 décembre 2005 en réponse à la lettre d’observations notifiée par l’Urssaf le 14 novembre 2005, indiquant clairement le motif du redressement à savoir la réintégration, dans l’assiette des cotisations des royalties versées à M. [R] au titre du contrat de réalisateur artistique, les raisons précises de cette réintégration avec le relevé des bases de calcul, du montant de la régularisation et du support textuel et juridique de celle-ci », cependant qu’il résultait de ses propres constatations que le décompte récapitulatif annexé à la lettre de mise en demeure mentionnait à la rubrique « nature des cotisations », « régime général », de sorte qu’elle était insuffisante en ce qu’il n’y était pas précisé la nature exacte des sommes réclamées, et que les indications figurant sur ces documents ne permettaient pas à l’assujetti de connaître la cause, la nature et l’étendue de son obligation, la cour d’appel de renvoi a violé les articles L. 244-2 et R. 244-1 et R. 243-59 du code de la sécurité sociale ;

2°/ que la mise en demeure, qui constitue une invitation impérative adressée au débiteur d’avoir à régulariser sa situation dans le délai imparti, doit permettre effectivement à l’assujetti d’avoir connaissance de la nature, de la cause et de l’étendue de son obligation, afin de pouvoir exercer ses droits et, le cas échéant, contester utilement le redressement objet de la mise en demeure ; qu’à cette fin, il importe que cette mise en demeure précise, à peine de nullité, outre la nature et le montant des cotisations réclamées, la période à laquelle elle se rapporte, sans que soit exigée la preuve d’un préjudice ; que la société invoquait devant la cour d’appel le moyen tiré de ce que, alors que le redressement litigieux tendait en réalité à assujettir les royalties afférents à plusieurs contrats différents, le contrat de réalisateur artistique du 1er juillet 1998, dont l’Urssaf prétendait qu’il était seul concerné par le redressement, n’était pas même visé dans la rubrique des documents consultés de la lettre d’observations (cf. conclusions d’appel n° 3 devant la cour d’appel de renvoi de la société (p.7, productions) ; qu’en statuant comme elle l’a fait, sans répondre à ce moyen déterminant de l’exposante, de nature à établir l’irrégularité du redressement, la cour d’appel a méconnu les exigences de l’article 455 du code de procédure civile ;

3°/ qu’il résulte de l’article R. 243-59 du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction issue du décret n° 2007-546 du 11 avril 2007, applicable au contrôle litigieux, que l’organisme de recouvrement doit, à peine de nullité des opérations de contrôle, mettre à même l’employeur ou le travailleur indépendant d’accéder à la charte du cotisant contrôlé avant l’ouverture de celles-ci ; qu’en s’abstenant de vérifier si la société avait été à même d’accéder à la charte du cotisant contrôlé avant le début des opérations de contrôle, la cour d’appel de renvoi a violé l’article R. 243-59 du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction issue du décret n° 2007-546 du 11 avril 2007, applicable au litige. »

Réponse de la Cour

3. L’arrêt retient que la mise en demeure litigieuse comportait le numéro du cotisant et le service qui l’a émis, l’objet de la mise en recouvrement, la période du contrôle et le montant correspondant à celui figurant sur la lettre d’observations notifiée à la société ainsi que les majorations de retard, qu’elle était accompagnée, d’une part, d’une copie de l’état du redressement, adressé le 22 décembre 2005 au cotisant par lettre recommandée avec accusé de réception, et d’autre part, du décompte récapitulatif portant le détail des années redressées et le cadre du redressement soit « le régime général. »

4. Il ajoute qu’elle faisait référence au courrier détaillé et argumenté adressé par la société le 14 décembre 2005 en réponse à la lettre d’observations notifiée par l’Urssaf le 14 novembre 2005, indiquant clairement le motif du redressement à savoir la réintégration, dans l’assiette des cotisations des « royalties » versées à M. [R] au titre du contrat de réalisateur artistique, les raisons précises de cette réintégration avec le relevé des bases de calcul, du montant de la régularisation et du support textuel et juridique de celle-ci.

5. De ces constatations, la cour d’appel, qui n’était pas tenue de suivre les parties dans le détail de leur argumentation, en a déduit à bon droit que, la mise en demeure permettant à la société de connaître la nature, la cause et l’étendue de son obligation, les opérations de contrôle et de redressement étaient régulières.

6. Le moyen n’est, dès lors, pas fondé.

Mais sur le second moyen pris en ses deux premières branches

Enoncé du moyen

La société et M. [R] font grief à l’arrêt de condamner la société à payer à l’Urssaf la somme de 44 200 euros au titre de cotisations et de renvoyer l’Urssaf à procéder à un nouveau calcul des majorations de retard, alors :

« 1°/ que la rémunération due à l’artiste à l’occasion de la vente ou de l’exploitation de l’enregistrement de son interprétation, exécution ou présentation par l’employeur ou tout autre utilisateur n’est pas considérée comme salaire dès que la présence physique de l’artiste n’est plus requise pour exploiter cet enregistrement et que cette rémunération n’est pas fonction du salaire reçu pour la production de son interprétation, exécution ou présentation, mais est fonction du produit de la vente ou de l’exploitation de cet enregistrement ; qu’à cet égard, l’artiste réalisant un album musical, dont l’élaboration lui est confiée en toute liberté, accomplit bien une prestation artistique nonobstant le fait que les chansons enregistrées sont interprétées par un autre artiste-interprète ; qu’en affirmant dès lors que le versement des royalties est sans rapport avec l’exploitation de l’enregistrement d’une prestation personnelle de M. [R], qu’elle concerne exclusivement l’exploitation de l’enregistrement de la prestation personnelle de [Z] [Y], et qu’elle n’est qu’un complément du versement octroyé par la société Monkey Stuffed à la société dont M. [R] est le dirigeant en contrepartie du travail d’enregistrement accompli dans le cadre du contrat commercial du 23 juin 1998, de sorte que si M. [R] relève de la catégorie d’artiste de spectacle, en revanche, la redevance qui lui est versée en contrepartie de son travail de réalisateur artistique ne constitue pas une rémunération à l’occasion de la vente ou de l’exploitation de l’enregistrement de son interprétation personnelle au sens des dispositions de l’article L. 762-2 précité et qu’en conséquence, la présomption de l’article L. 762-1 précité s’applique de sorte que les sommes versées à M. [R], qualifiées de royalties, doivent être requalifiées en salaire et réintégrées dans l’assiette des cotisations » cependant qu’elle avait constaté que M. [R] relevait de la catégorie d’artiste de spectacle et qu’il était constant, suivant le contrat, que le versement des avances de redevances était fonction du produit de la vente et du produit de l’exploitation de l’enregistrement de l’album qu’il avait réalisé, la cour d’appel de renvoi a violé l’article L. 7121-8 du code du travail ;

2°/ que la rémunération due à l’artiste à l’occasion de la vente ou de l’exploitation de l’enregistrement de son interprétation, exécution ou présentation par l’employeur ou tout autre utilisateur n’est pas considérée comme salaire dès que la présence physique de l’artiste n’est plus requise pour exploiter cet enregistrement et que cette rémunération n’est pas fonction du salaire reçu pour la production de son interprétation, exécution ou présentation, mais est fonction du produit de la vente ou de l’exploitation de cet enregistrement ; qu’en énonçant que « si M. [R] relève de la catégorie d’artiste de spectacle, en revanche, la redevance qui lui est versée en contrepartie de son travail de réalisateur artistique ne constitue pas une rémunération à l’occasion de la vente ou de l’exploitation de l’enregistrement de son interprétation personnelle au sens des dispositions de l’article L. 762-2 précité et qu’en conséquence, la présomption de l’article L. 762-1 précité s’applique de sorte que les sommes versées à M. [R], qualifiées de royalties, doivent être requalifiées en salaire et réintégrées dans l’assiette des cotisations » cependant que la présence physique de M. [R], dont elle avait retenu qu’il relevait de la catégorie d’artiste, n’était plus requise pour exploiter cet enregistrement, la cour d’appel de renvoi a violé l’article L. 7121-8 du code du travail. »

Réponse de la Cour

Vu les articles L. 762-1 et L. 762-2 devenus L. 7121-3 et L. 7121-8 du code du travail, dans leur rédaction applicable au litige :

7. Selon le premier de ces textes, tout contrat par lequel une personne s’assure, moyennant rémunération, le concours d’un artiste du spectacle en vue de sa production, est présumé être un contrat de travail dès lors que cet artiste n’exerce pas l’activité qui fait l’objet de ce contrat dans les conditions impliquant son inscription au registre du commerce.

8. Selon le second, la rémunération due à l’artiste à l’occasion de la vente ou de l’exploitation de l’enregistrement de son interprétation, exécution ou présentation par l’employeur ou tout autre utilisateur n’est pas considérée comme salaire dès que la présence physique de l’artiste n’est plus requise pour exploiter cet enregistrement et que cette rémunération n’est pas fonction du salaire reçu pour la production de son interprétation, exécution ou présentation, mais est fonction du produit de la vente ou de l’exploitation de cet enregistrement.

9. Pour décider que la redevance versée à M. [R] en contrepartie de son travail de réalisateur artistique ne constituait pas une rémunération à l’occasion de la vente ou de l’exploitation de l’enregistrement au sens de ce texte et décider que les sommes payées, qualifiées de royalties, devaient être re-qualifiées en salaire et réintégrées dans l’assiette des cotisations, l’arrêt relève qu’il est manifeste que M. [R], qui choisit les musiciens et les techniciens concourant à la réalisation de l’enregistrement de l’album, dirige et coordonne l’activité des personnels techniques et artistiques, fait les choix artistiques concernant les sons, les choeurs, les voix, l’harmonie et le mixage, n’est pas un simple exécutant technique obéissant aux directives de la production, mais qu’il apporte à la réalisation de l’oeuvre qui lui est confiée ses connaissances, sa personnalité ainsi que l’expression de son talent et de sa créativité, qu’il est donc un artiste du spectacle, chargé comme il le revendique, de porter à la connaissance du public une oeuvre reflétant sa conception artistique et son talent personnel.

10. L’arrêt ajoute que M. [R] n’est pas un artiste auteur, que l’article L. 762-2 du code du travail, dans sa rédaction applicable au litige, prévoit que l’exclusion de la rémunération de l’assiette des cotisations suppose que cette rémunération soit fonction uniquement du produit de la vente ou de l’exploitation de l’enregistrement de la prestation personnelle de l’artiste et ce d’une manière aléatoire, que s’agissant de la qualification des sommes versées à M. [R] en exécution du contrat du 1er juillet 1998, celui-ci prévoit en son article 5 le versement de royalties « calculées sur 100% des ventes réalisées (...) sur les supports phonographiques reproduisant tout ou partie du phonogramme qui constitue l’objet des présents et qui auront été commercialisées directement ou indirectement par la société Monkey Stuffed », que cette société est gérée par Mme [Z] [Y], qui, par contrat du 23 juin 1998, a confié à la société Calliphora la réalisation de l’enregistrement d’un album moyennant le versement au profit de cette dernière de redevances de 6% sur l’ensemble des ventes des supports phonographiques réalisés, que c’est à tort que la société Calliphora soutient que la rémunération de M. [R] est fonction du seul produit de l’exploitation de la réalisation artistique qu’il a effectuée sur l’album « Innamoramento » pour laquelle il a disposé d’une liberté pleine et entière, qu’en effet, le versement des royalties est sans rapport avec l’exploitation de l’enregistrement d’une prestation personnelle de M. [R], qu’elle concerne exclusivement l’exploitation de l’enregistrement de la prestation personnelle de [Z] [Y], qu’elle n’est qu’un complément du versement octroyé par la société Monkey Stuffed à la société Calliphora dont M. [R] est le dirigeant en contrepartie du travail d’enregistrement accompli dans le cadre du contrat commercial du 23 juin 1998, que dès lors, si M. [R] relève de la catégorie d’artiste de spectacle, en revanche, la redevance qui lui est versée en contrepartie de son travail de réalisateur artistique ne constitue pas une rémunération à l’occasion de la vente ou de l’exploitation de l’enregistrement de son interprétation personnelle au sens des dispositions de l’article L. 762-2 précité.

11. En statuant ainsi, alors qu’elle avait constaté que M. [R] relevait de la catégorie d’artiste du spectacle pour l’exécution du contrat de réalisateur artistique du 1er juillet 1998, lequel prévoyait une rémunération proportionnelle aux résultats des ventes et de l’exploitation de l’enregistrement de l’album qu’il avait réalisé, qui ne requérait plus sa présence physique, ce dont il résultait que les sommes litigieuses ne présentaient pas le caractère de salaire et que le redressement n’était pas fondé, la cour d’appel a violé le texte susvisé.

Portée et conséquences de la cassation

12. Après avis donné aux parties, conformément à l’article 1015 du code de procédure civile, il est fait application des articles L. 411-3, alinéa 2, du code de l’organisation judiciaire et 627 du code de procédure civile.

13. L’intérêt d’une bonne administration de la justice justifie, en effet, que la Cour de cassation statue au fond.

14. Les conditions de l’article L. 762-2 devenu L. 7121-8 du code du travail, dans sa rédaction applicable au litige étant réunies, les « royalties » perçues par M. [R] en exécution du contrat de réalisateur artistique du 1er juillet 1998 ne constituant pas un salaire, le redressement contesté n’était pas fondé.

PAR CES MOTIFS, et sans qu’il y ait lieu de statuer sur les autres griefs du pourvoi, la Cour :

CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu’il a déclaré régulier le contrôle, l’arrêt rendu le 15 février 2019, entre les parties, par la cour d’appel de Paris ;

DIT n’y avoir lieu à renvoi ;

DIT n’y avoir lieu à réintégration dans l’assiette des cotisations des "royalties" versées par la société Calliphora à M. [O] [R] en exécution du contrat de réalisateur artistique du 1er juillet 1998 ;

REJETTE les demandes de l’URSSAF [Localité 1] ;

Condamne l’URSSAF [Localité 1] aux dépens ;

En application de l’article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par l’URSSAF [Localité 1] et la condamne à payer à la société Calliphora et M. [R] la somme globale de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l’arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du trois juin deux mille vingt et un.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt

Moyens produits par la SCP Rocheteau et Uzan-Sarano, avocat aux Conseils, pour la société Calliphora et M. [R]

PREMIER MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief à l’arrêt attaqué d’AVOIR validé le redressement pour les cotisations des années 2003 et 2004 ;

AUX MOTIFS QUE la mise en demeure qui constitue une invitation impérative adressée au débiteur d’avoir à régulariser sa situation dans un délai imparti et la contrainte délivrée à la suite de la mise en demeure restée sans effet doivent permettre à l’intéressé d’avoir connaissance de la nature, de la cause et de l’étendue de son obligation ; que la société fait valoir que le contrat de réalisateur artistique du 1er juillet 1998 n’est pas visé dans la lettre d’observations dans la rubrique des documents consultés , l’Urssaf ne l’évoquant que comme un contrat - cadre, évoquant une oeuvre audiovisuelle, que la correspondance de l’inspecteur du recouvrement indique simplement que les constatations ont été partiellement revues, que la mise en demeure se borne à indiquer que les cotisations se rapportent au « Régime Général » sans toutefois préciser la nature des cotisations réclamées, qu’elle ne mentionne aucun chef de redressement, que le seul contrat qui fonde tout le redressement n’est jamais cité dans la mise en demeure de sorte que celle- ci ne lui permettait pas de déterminer ni les bases du redressement ni l’assiette prise en considération par l’Urssaf pour procéder au redressement, que l’Urssaf est incapable de justifier du bien fondé du principe du redressement et de l’exactitude de l’assiette, qu’elle n’explique pas quels éléments factuels et juridiques justifient l’intégration dans l’assiette du redressement des redevances versées en exécution d’albums différents d’Innamoramento produits pour certains par une autre société (Requiem Publishing) et interprété par une autre artiste que [Z] [Y] (en l’occurrence [X] ) que la mise en demeure ne respecte pas les conditions de motivation exigées et ne permet pas un chiffrage correct de l’assiette cotisable sur le fondement juridique du contrat contrôlé, que les irrégularités doivent entraîner la nullité de la mise en demeure et du redressement qui s’ensuit ; que l’Urssaf réplique que la lettre d’observations du 12 novembre 2005, qui a précédé cette mise en demeure, a permis à l’employeur de connaître la nature des reproches, la cause et l’étendue du redressement envisagé, que la liste des documents consultés mentionne la DADS 2, document de nature fiscale qui relate les versements de Calliphora à M. [R] son collaborateur, que le motif du redressement mentionne la consultation « du contrat de réalisateur artistique » et vise des textes légaux ne laissant place à aucune ambiguïté (articles L. 212-6, L. 382-3 et suivants du code de la propriété intellectuelle, article L. 242-1 du code de la sécurité sociale), que la réponse de l’employeur en date du 14 décembre 2005 démontre que la société Calliphora n’a pas pu se méprendre sur les motifs du redressement, que dès lors le moyen de nullité présenté doit être rejeté et la lettre d’observations et la mise en demeure subséquente doivent être déclarées régulières ; que force est de constater que la mise en demeure litigieuse comportait le numéro du cotisant et le service qui l’a émis, l’objet de la mise en recouvrement, la période du contrôle et le montant correspondant à celui figurant sur la lettre d’observations notifiée à la société ainsi que les majorations de retard ; qu’elle était accompagnée, d’une part, d’une copie de l’état du redressement, adressé le 22 décembre 2005 au cotisant par lettre recommandée avec accusé de réception, et d’autre part, du décompte récapitulatif portant le détail des années redressées et le cadre du redressement soit « le régime général » ; qu’elle faisait référence au courrier détaillé et argumenté adressé par la société le 14 décembre 2005 en réponse à la lettre d’observations notifiée par l’Urssaf le 14 novembre 2005, indiquant clairement le motif du redressement à savoir la réintégration, dans l’assiette des cotisations des royalties versées à M. [R] au titre du contrat de réalisateur artistique, les raisons précises de cette réintégration avec le relevé des bases de calcul, du montant de la régularisation et du support textuel et juridique de celle-ci ; que la société Calliphora est mal fondée à soutenir qu’elle ignorait le fondement juridique du redressement en ce qu’en réponse à la lettre d’observations du 14 novembre 2005, elle expose à l’Urssaf par courrier du 14 décembre 2005 « Votre lettre d’observations du 14 novembre 2005 appelle de notre part les remarques suivantes : « Votre vérification a porté sur le contrat de réalisateur artistique passé le 1er juillet 1998 entre notre société et M. [O] [R]. L’objet de ce contrat portait sur l’album intitulé Innamoramento. Il s’agit en l’espèce d’une captation phonographique. ( ... ) Aussi, les sommes en cause ne sont-elles pas, ainsi que vous le soutenez dans votre lettre d’observations "représentatives que de l’exécution matérielle de la conception de l’enregistrement de l’album (...) et non d’une création intellectuelle d’une oeuvre audiovisuelle mais la contrepartie d’une conception artistique, le contrat incriminé ayant parfaitement opéré une distinction entre l’exécution matérielle de la conception de l’enregistrement de l’album et la conception artistique de cet enregistrement, la liberté de choix artistique reconnue à M. [O] [R] étant en l’espèce patente à tous égards » ; qu’ainsi, il est parfaitement démontré que la société connaissait le fondement juridique du redressement ; qu’au vu de l’ensemble de ces éléments, il est constant que la mise en demeure permettait à la société de connaître la nature, la cause et l’étendue de son obligation ; que le contrôle opéré par les services de l’Urssaf est donc parfaitement régulier ;

1) ALORS QUE la mise en demeure, qui constitue une invitation impérative adressée au débiteur d’avoir à régulariser sa situation dans le délai imparti, doit permettre effectivement à l’assujetti d’avoir connaissance de la nature, de la cause et de l’étendue de son obligation, afin de pouvoir exercer ses droits et, le cas échéant, contester utilement le redressement objet de la mise en demeure ; qu’à cette fin, il importe que cette mise en demeure précise, à peine de nullité, outre la nature et le montant des cotisations réclamées, la période à laquelle elle se rapporte, sans que soit exigée la preuve d’un préjudice ; que la lettre de mise en demeure qui mentionne à la rubrique « nature des cotisations », « régime général », est insuffisante en ce qu’il n’est pas précisé la nature exacte des sommes réclamées ; qu’en énonçant en l’espèce que « la mise en demeure litigieuse comportait le numéro du cotisant et le service qui l’a émis, l’objet de la mise en recouvrement, la période du contrôle et le montant correspondant à celui figurant sur la lettre d’observations notifiée à la société ainsi que les majorations de retard, qu’elle était accompagnée, d’une part, d’une copie de l’état du redressement, adressé le 22 décembre 2005 au cotisant par lettre recommandée avec accusé de réception, et d’autre part, du décompte récapitulatif portant le détail des années redressées et le cadre du redressement soit « le régime général », qu’elle faisait référence au courrier détaillé et argumenté adressé par la société le 14 décembre 2005 en réponse à la lettre d’observations notifiée par l’Urssaf le 14 novembre 2005, indiquant clairement le motif du redressement à savoir la réintégration, dans l’assiette des cotisations des royalties versées à M. [R] au titre du contrat de réalisateur artistique, les raisons précises de cette réintégration avec le relevé des bases de calcul, du montant de la régularisation et du support textuel et juridique de celle-ci », cependant qu’il résultait de ses propres constatations que le décompte récapitulatif annexé à la lettre de mise en demeure mentionnait à la rubrique « nature des cotisations », « régime général », de sorte qu’elle était insuffisante en ce qu’il n’y était pas précisé la nature exacte des sommes réclamées, et que les indications figurant sur ces documents ne permettaient pas à l’assujetti de connaître la cause, la nature et l’étendue de son obligation, la cour d’appel de renvoi a violé les articles L. 244-2 et R. 244-1 et R. 243-59 du code de la sécurité sociale ;

2) ALORS QUE la mise en demeure, qui constitue une invitation impérative adressée au débiteur d’avoir à régulariser sa situation dans le délai imparti, doit permettre effectivement à l’assujetti d’avoir connaissance de la nature, de la cause et de l’étendue de son obligation, afin de pouvoir exercer ses droits et, le cas échéant, contester utilement le redressement objet de la mise en demeure ; qu’à cette fin, il importe que cette mise en demeure précise, à peine de nullité, outre la nature et le montant des cotisations réclamées, la période à laquelle elle se rapporte, sans que soit exigée la preuve d’un préjudice ; que la société Calliphora invoquait devant la cour d’appel le moyen tiré de ce que, alors que le redressement litigieux tendait en réalité à assujettir les royalties afférents à plusieurs contrats différents, le contrat de réalisateur artistique du 1er juillet 1998, dont l’Urssaf prétendait qu’il était seul concerné par le redressement, n’était pas même visé dans la rubrique des documents consultés de la lettre d’observations (cf. conclusions d’appel n° 3 devant la cour d’appel de renvoi de la société Calliphora p. 7, productions) ; qu’en statuant comme elle l’a fait, sans répondre à ce moyen déterminant de l’exposante, de nature à établir l’irrégularité du redressement, la cour d’appel a méconnu les exigences de l’article 455 du code de procédure civile ;

3) ALORS SUBSIDIAIREMENT QU’il résulte de l’article R. 243-59 du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction issue du décret n° 2007-546 du 11 avril 2007, applicable au contrôle litigieux, que l’organisme de recouvrement doit, à peine de nullité des opérations de contrôle, mettre à même l’employeur ou le travailleur indépendant d’accéder à la charte du cotisant contrôlé avant l’ouverture de celles-ci ; qu’en s’abstenant de vérifier si la société Calliphora avait été à même d’accéder à la charte du cotisant contrôlé avant le début des opérations de contrôle, la cour d’appel de renvoi a violé l’article R. 243-59 du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction issue du décret n° 2007-546 du 11 avril 2007, applicable au litige.

SECOND MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief à l’arrêt attaqué d’AVOIR condamné la société Calliphora à payer à l’Urssaf [Localité 1] la somme de 44 200 euros au titre de cotisations et renvoyé l’Urssaf [Localité 1] à procéder à un nouveau calcul des majorations de retard ;

AUX MOTIFS QU’il est rappelé à titre liminaire que l’année 2002 est prescrite ; que le litige ne porte que sur les sommes allouées en 2003 et 2004 à M. [O] [R] ; qu’ainsi qu’il vient d’être ci-dessus retenu, la vérification de l’Urssaf n’a porté que sur le contrat de réalisateur artistique passé le 1er juillet 1998 entre la société Calliphora et M. [O] [R] et sur les sommes rémunérant l’exploitation de l’album Innamoramento et non pas sur les royalties incluant des redevances provenant d’autres contrats que celui conclu le 1er juillet 1998 ; qu’il résulte de l’article L. 762-1 du code du travail, dans sa version applicable au litige, que tout contrat par lequel une personne physique ou morale s’assure, moyennant rémunération, le concours d’un artiste du spectacle en vue de sa production, est présumé être un contrat de travail, dès lors que cet artiste n’exerce pas l’activité, objet de ce contrat, dans des conditions impliquant son inscription au registre du commerce ; que les dispositions de l’article L. 762-2 du code du travail dans sa version applicable au litige, prévoient que n’est pas considéré comme salaire la rémunération due à l’artiste à l’occasion de la vente ou de l’exploitation de l’enregistrement de son interprétation par l’employeur ou tout autre utilisateur, dès que la présence physique de l’artiste n’est plus requise pour exploiter l’enregistrement et que cette rémunération n’est en rien fonction du salaire perçu par la production de son interprétation, exécution ou présentation mais au contraire fonction du produit de la vente ou de l’exploitation dudit enregistrement ; qu’ainsi, deux sortes de rémunérations peuvent être perçues par les artistes de spectacle : - soit un cachet, lorsque l’artiste réalise une prestation physique, qui constitue un salaire et qui est donc soumis à cotisations et contributions sociales, - soit des redevances ou royalties à l’occasion de l’exploitation secondaire de sa prestation (disques, rediffusion radiophonique) ; que la société Calliphora, société de production musicale dont M. [O] [R] est le président directeur général, a conclu avec ce dernier le 1er juillet 1998 un contrat de réalisateur artistique dont l’objet portait sur la conception et l’enregistrement de l’album de [Z] [Y] « Innamoramento »" ; que ce contrat prévoyait que M. [R] était chargé notamment de : - assurer la direction et la réalisation artistique des séances d’enregistrement, - définir les modalités de production de l’enregistrement, - superviser et diriger les séances d’enregistrement afin d’assurer la qualité technique et artistique de l’album, - gérer le budget déterminé par la société, - faire signer les feuilles de séances aux musiciens et les contrats des artistes aux termes duquel il était chargé de veiller à régler les factures et les cachets ; qu’en contrepartie de ces prestations, il était convenu une avance de 763 000 euros outre le versement de royalties d’un montant de 315 127 euros en 2002, de 100 000 euros en 2003 et 2004 ; qu’en application de l’article L. 762-1 du code du travail dans sa version applicable au litige, sont considérés comme artistes de spectacle notamment l’artiste lyrique, l’artiste dramatique, l’artiste chorégraphique, l’artiste de variétés, le musicien, le chansonnier, l’artiste de complément, le chef d’orchestre, l’arrangeur - orchestrateur et pour l’exécution matérielle de sa conception artistique, le metteur en scène ; qu’il est manifeste que M. [R], qui choisit les musiciens et les techniciens concourant à la réalisation de l’enregistrement de l’album, dirige et coordonne l’activité des personnels techniques et artistiques, fait les choix artistiques concernant les sons, les choeurs, les voix, l’harmonie et le mixage, n’est pas un simple exécutant technique obéissant aux directives de la production mais qu’il apporte à la réalisation de l’oeuvre qui lui est confiée ses connaissances, sa personnalité ainsi que l’expression de son talent et de sa créativité ; qu’il est donc un artiste de spectacle chargé, comme il le revendique, de porter à la connaissance du public une oeuvre reflétant sa conception artistique et son talent personnel ; qu’il n’est pas un artiste auteur ; qu’il convient donc d’ordonner la mise hors de cause de l’Agessa ; que l’article L. 762-2 du code du travail, dans sa rédaction applicable au litige, prévoit que l’exclusion de la rémunération de l’assiette des cotisations suppose, que cette rémunération soit fonction uniquement du produit de la vente ou de l’exploitation de l’enregistrement de la prestation personnelle de l’artiste et ce d’une manière aléatoire ; que s’agissant de la qualification des sommes versées à M. [R] en exécution du contrat du 1er juillet 1998, celui-ci prévoit en son article 5 le versement de royalties « calculées sur 100% des ventes réalisées (...) sur les supports phonographiques reproduisant tout ou partie du phonogramme qui constitue l’objet des présents et qui auront été commercialisées directement ou indirectement par la société Monkey Stuffed » ; que cette société est gérée par Mme [Z] [Y], qui, par contrat du 23 juin 1998, a confié à la société Calliphora la réalisation de l’enregistrement d’un album moyennant le versement au profit de cette dernière de redevances de 6% sur l’ensemble des ventes des supports phonographiques réalisés ; que c’est à tort que la société Calliphora soutient que la rémunération de M. [R] est fonction du seul produit de l’exploitation de la réalisation artistique qu’il a effectuée sur l’album Innamoramento pour laquelle il a disposé d’une liberté pleine et entière ; qu’en effet, le versement des royalties est sans rapport avec l’exploitation de l’enregistrement d’une prestation personnelle de M. [R] ; qu’elle concerne exclusivement l’exploitation de l’enregistrement de la prestation personnelle de [Z] [Y] ; qu’elle n’est qu’un complément du versement octroyé par la société Monkey Stuffed à la société Calliphora dont M. [R] est le dirigeant en contrepartie du travail d’enregistrement accompli dans le cadre du contrat commercial du 23 juin 1998 ; que dès lors, si M. [R] relève de la catégorie d’artiste de spectacle, en revanche, la redevance qui lui est versée en contrepartie de son travail de réalisateur artistique ne constitue pas une rémunération à l’occasion de la vente ou de l’exploitation de l’enregistrement de son interprétation personnelle au sens des dispositions de l’article L. 762-2 précité ; qu’en conséquence, la présomption de l’article L. 762-1 précité s’applique de sorte que les sommes versées à M. [R], qualifiées de royalties, doivent être requalifiées en salaire et réintégrées dans l’assiette des cotisations ; Sur le chiffrage du redressement : que la société Calliphora fait valoir que l’Urssaf, tout au long de la procédure, a entendu se référer au seul contrat ayant pour objet l’album Innamoramento, qu’elle a procédé à une régularisation de cotisations pour un montant global de 109 764 euros décomposée de la manière suivante : - l’année 2002 est désormais exclue puisque atteinte par la prescription (65 564 euros HT) - 2003 : 21 950 euros HT ? 2004 : 22 250 euros HT ; qu’elle expose que si M. [R] a perçu au titre des royalties, les montants de 100 000 euros HT pour l’année 2003 et de 100 000 euros pour l’année 2004, qu’ils correspondent à la rémunération qu’il a perçue au titre de différents albums et d’autres activités artistiques et non au titre du seul album Innamoramento, qu’elle en justifie par la production de diverses pièces et notamment par des relevés de redevances transmis par le producteur Stuffed Monkey pour [Z] [Y] et le producteur Requiem Publishing pour la chanteuse Alizée, par l’attestation du comptable de la société Calliphora, par la déclaration DADS 2 des sommes versées à M. [R], par l’attestation du producteur la société Stuffed Monkey et qu’au vu de ces pièces, le montant des redevances dues à M. [R] pour l’album Innamoramento objet du contrat du 1er juillet 1998, s’élève aux sommes de 1 487,11 euros HT pour l’année 2003 et 1 093,75 euros HT pour l’année 2004, que c’est à tort que l’Urssaf s’est basée sur les redevances perçues par M. [R] au titre de ses différentes activités et non au titre du seul album Innamoramento ; que l’Urssaf rétorque que l’inspecteur du recouvrement a validé le chiffrage proposé par la société Calliphora elle-même dans son courrier du 14 décembre 2005 , qu’à aucun moment l’Urssaf n’a fait état d’un autre contrat, que le chiffrage ramené par la société à hauteur de 1487,11 euros HT pour l’année 2003 et 1 093,75 euros HT pour l’année 2004 ne concorde pas avec les pièces justificatives produites, que les chiffres avancés dans l’attestation du comptable ne concordent pas avec les DADS 2 produites au titre des années 2003 et 2004 ; que la société produit aujourd’hui, à l’appui de sa demande de modification du chiffrage du redressement, des tableaux de redevances pour les années 2003 et 2004 et des extraits du grand livre Calliphora concernant les versements de royalties pour Requiem Publishing et Stuffed Monkey pour la période de 2002 à 2004, une attestation de Mme [T], alors chef comptable de la société Calliphora, mentionnant que pour l’année 2003 les redevances dues à M. [O] [R] au titre de l’album Innamoramento s’élèvent à la somme de 1 487,11 euros HT et que celles qui lui sont dues au même titre pour l’année 2004 sont de 1 093,75 euros HT, que le faible montant des redevances s’explique par le fait que l’album est sorti en 1999 et que les plus importantes redevances ont été versées en 2000 et 2001 ; qu’il doit être constaté que les différentes pièces produites par la société ne permettent pas de confirmer les montants de 1 487,11 euros HT et 1 093,75 euros HT avancés par la société ; que de plus, comme le souligne à juste titre l’Urssaf, la société Calliphora, en réponse à la lettre d’observations du 14 novembre 2005 avait proposé à l’Urssaf dans son courrier du 14 décembre 2005 un chiffrage que l’Urssaf a validé : « Le contrat de réalisateur artistique du 1er juillet 1998 prévoit en son article 2.5 que les redevances versées à M. [R] sont" versées sur présentation d’une facture, celles-ci étant majorées de la TVA, par application de l’article 5 de la loi n° 91-716 du 26 juillet 1991, ce qui fut le cas. Le montant des sommes HT versées à M. [R] s’élève donc à - Année 2002 : 315 127 euros TTC soit 298 698,57 euros HT, - Année 2003 : 105 500 euros TTC soit 100 000 euros HT, - Année 2004 : 105 500 euros TTC soit 100 000 euros HT, Soit un total HT de 498 698,58 euros. C’est donc cette somme de 498 698,58 euros HT qui, en cas de maintien de votre régularisation de cotisations, devra être prise en compte pour le décompte des cotisations. Il en résulterait une régularisation s’élevant à un montant de 109 464,33 euros, ce montant ayant déjà été par ailleurs assujetti au prélèvement de la CSG et de la CRDS » ; que la société Calliphora, au vu de ce courrier et de sa carence à produire toute pièce justificative utile, est donc mal fondée à soutenir que la somme de 100 000 euros de redevances perçue par M. [R] pour chacune des années 2003 et 2004 ne concerne pas seulement l’album Innamoramento mais également d’autres albums ; qu’en conséquence, le redressement sera validé sous réserve de la prescription acquise pour l’année 2002 ; que la société Calliphora devra donc régler à l’Urssaf une somme de 44 200 euros à charge pour l’Urssaf de recalculer le montant des majorations de retard sur cette somme ;

1) ALORS QUE la rémunération due à l’artiste à l’occasion de la vente ou de l’exploitation de l’enregistrement de son interprétation, exécution ou présentation par l’employeur ou tout autre utilisateur n’est pas considérée comme salaire dès que la présence physique de l’artiste n’est plus requise pour exploiter cet enregistrement et que cette rémunération n’est pas fonction du salaire reçu pour la production de son interprétation, exécution ou présentation, mais est fonction du produit de la vente ou de l’exploitation de cet enregistrement ; qu’à cet égard, l’artiste réalisant un album musical, dont l’élaboration lui est confiée en toute liberté, accomplit bien une prestation artistique nonobstant le fait que les chansons enregistrées sont interprétées par un autre artiste-interprète ; qu’en affirmant dès lors que le versement des royalties est sans rapport avec l’exploitation de l’enregistrement d’une prestation personnelle de M. [R], qu’elle concerne exclusivement l’exploitation de l’enregistrement de la prestation personnelle de [Z] [Y], et qu’elle n’est qu’un complément du versement octroyé par la société Monkey Stuffed à la société Calliphora dont M. [R] est le dirigeant en contrepartie du travail d’enregistrement accompli dans le cadre du contrat commercial du 23 juin 1998, de sorte que si M. [R] relève de la catégorie d’artiste de spectacle, en revanche, la redevance qui lui est versée en contrepartie de son travail de réalisateur artistique ne constitue pas une rémunération à l’occasion de la vente ou de l’exploitation de l’enregistrement de son interprétation personnelle au sens des dispositions de l’article L. 762-2 précité et qu’en conséquence, la présomption de l’article L. 762-1 précité s’applique de sorte que les sommes versées à M. [R], qualifiées de royalties, doivent être requalifiées en salaire et réintégrées dans l’assiette des cotisations » cependant qu’elle avait constaté que M. [R] relevait de la catégorie d’artiste de spectacle et qu’il était constant, suivant le contrat, que le versement des avances de redevances était fonction du produit de la vente et du produit de l’exploitation de l’enregistrement de l’album qu’il avait réalisé, la cour d’appel de renvoi a violé l’article L. 7121-8 du code du travail ;

2) ALORS QUE la rémunération due à l’artiste à l’occasion de la vente ou de l’exploitation de l’enregistrement de son interprétation, exécution ou présentation par l’employeur ou tout autre utilisateur n’est pas considérée comme salaire dès que la présence physique de l’artiste n’est plus requise pour exploiter cet enregistrement et que cette rémunération n’est pas fonction du salaire reçu pour la production de son interprétation, exécution ou présentation, mais est fonction du produit de la vente ou de l’exploitation de cet enregistrement ; qu’en énonçant que « si M. [R] relève de la catégorie d’artiste de spectacle, en revanche, la redevance qui lui est versée en contrepartie de son travail de réalisateur artistique ne constitue pas une rémunération à l’occasion de la vente ou de l’exploitation de l’enregistrement de son interprétation personnelle au sens des dispositions de l’article L. 762-2 précité et qu’en conséquence, la présomption de l’article L. 762-1 précité s’applique de sorte que les sommes versées à M. [R], qualifiées de royalties, doivent être requalifiées en salaire et réintégrées dans l’assiette des cotisations » cependant que la présence physique de M. [R], dont elle avait retenu qu’il relevait de la catégorie d’artiste, n’était plus requise pour exploiter cet enregistrement, la cour d’appel de renvoi a violé l’article L. 7121-8 du code du travail ;

3°) ALORS QUE les juges du fond ne peuvent modifier du litige, tel que déterminé par les prétentions respectives des parties exprimées dans leurs conclusions ; qu’en l’espèce, pour qualifier de salaire les sommes litigieuses et refuser à M. [R] le bénéfice des dispositions de l’article L. 762-2 du code du travail tel qu’applicable au litige, l’Urssaf soutenait que « M. [R] ne fait que réunir les moyens matériels et humains nécessaires à la réalisation de cette oeuvre audiovisuelle, et que par conséquent, ces différentes tâches ne peuvent être qualifiées de prestations artistiques. Des « royalties » ne peuvent donc être versées à M. [R], ce dernier n’ayant pas la qualité d’artiste de spectacle au sens de l’article L. 762-2 du code du travail » (cf. conclusions d’appel en réplique de l’Urssaf, prod. p. 8) ; qu’en revanche, l’Urssaf ne soutenait nullement que, alors même que la qualité d’artiste de spectacle serait reconnue à M. [R], il ne pourrait pas bénéficier des dispositions de l’article L. 762-2 du code du travail ; que la cour d’appel a pour sa part, écartant la thèse de l’Urssaf, jugé qu’il est manifeste que M. [R], qui choisit les musiciens et les techniciens concourant à la réalisation de l’enregistrement de l’album, dirige et coordonne l’activité des personnels techniques et artistiques, fait les choix artistiques concernant les sons, les choeurs, les voix, l’harmonie et le mixage, n’est pas un simple exécutant technique obéissant aux directives de la production mais qu’il apporte à la réalisation de l’oeuvre qui lui est confiée ses connaissances, sa personnalité ainsi que j’expression de son talent et de sa créativité ; qu’il est donc un artiste de spectacle chargé, comme il le revendique, de porter à la connaissance du public une oeuvre reflétant sa conception artistique et son talent personnel ; qu’en retenant pourtant que, bien qu’ayant la qualité d’artiste de spectacle, M. [R] ne pouvait revendiquer le versement de royalties, quand cela n’était nullement invoqué par l’Urssaf, la cour d’appel a méconnu les termes du litige, et violé l’article 4 du code de procédure civile ;

4) ALORS QUE le juge doit observer en toutes circonstances le principe du contradictoire ; qu’en relevant d’office, sans provoquer les observations préalables des parties, le moyen tiré de ce que, bien qu’ayant la qualité d’artiste de spectacle et ayant apporté à la réalisation de l’oeuvre qui lui est confiée sa personnalité, son talent et sa créativité, M. [R] ne pouvait pas revendiquer la perception de royalties parce que l’exploitation en cause ne concernait que l’enregistrement de la prestation personnelle de Mme [Z] [Y], la cour d’appel a violé l’article 16 du code de procédure civile ;

5) ALORS subsidiairement QUE par des écritures d’appel demeurées sans réponse, la société Calliphora faisait valoir qu’il était impossible que le redressement porte sur une somme de 109 464,34 euros dès lors que l’album Innamoramento était sorti en 1999 et que les plus importantes redevances avaient été versées en 2000 et 2001 (cf. conclusions de l’exposante p. 11 § 3) ; qu’en ne répondant pas à ce moyen déterminant, la cour d’appel de renvoi a privé sa décision de motifs en violation de l’article 455 du code de procédure civile ;

6) ALORS QUE le juge a l’interdiction de dénaturer les documents qui lui sont soumis ; qu’en considérant que la société Calliphora, au vu du courrier du 14 décembre 2005 et de sa carence à produire toute pièce justificative utile, était mal fondée à soutenir que la somme de 100 000 euros de redevances perçue par M. [R] pour chacune des années 2003 et 2004 ne concernait pas seulement l’album Innamoramento mais également d’autres albums, quand dans cette lettre la société Calliphora s’était bornée à indiquer quel avait été l’ensemble des rémunérations versées à M. [R] pour chacune des années 2003 et 2004 et non les seules rémunérations relatives à l’album Innamoramento, objet du redressement, la cour d’appel de renvoi a violé le principe selon lequel il est interdit au juge de dénaturer les documents qui lui sont soumis.ECLI:FR:CCASS:2021:C200531