Faux travailleur indépendant

Cour de cassation

chambre criminelle

Audience publique du 17 juin 2003

N° de pourvoi : 02-84393

Non publié au bulletin

Rejet

Président : M. COTTE, président

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le dix-sept juin deux mille trois, a rendu l’arrêt suivant :

Sur le rapport de Mme le conseiller ANZANI, les observations de la société civile professionnelle PIWNICA et MOLINIE, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l’avocat général FINIELZ ;

Statuant sur le pourvoi formé par :

"-" X... Olivier,

"-" Y... Philippe,

contre l’arrêt de la cour d’appel de RIOM, chambre correctionnelle, en date du 29 mai 2002, qui, pour travail dissimulé et marchandage, les a condamnés, chacun, à 6 097,96 euros d’amende et a prononcé sur les intérêts civils ;

Vu les mémoires produits ;

Sur le second moyen de cassation, proposé pour Olivier X..., pris de la violation des articles L. 111-3 du Code pénal, L. 125-1, L. 125-3 et L. 152-3 du Code du travail, 388, 512, 591 et 593 du Code de procédure pénale, 6.1 et 6.3 a) de la Convention européenne des droits de l’homme, défaut de motifs, manque de base légale, ensemble violation des droits de la défense ;

”en ce que l’arrêt attaqué a déclaré Olivier X... et Philippe Y... coupables de prêt illicite de main-d’oeuvre ;

”aux motifs qu’Olivier X... et Philippe Y..., qui ont concouru à la mise en place d’un système tendant à transformer des “transporteurs indépendants” nommément désignés en de simples salariés, ne sauraient valablement reprocher à l’accusation un manque de précision dans la citation ; que, même si la qualité de commissionnaire de transport permettait à la société Exapaq de conserver la maîtrise du transport proprement dit, à savoir la détermination de la tournée et la possibilité de s’assurer de la bonne arrivée à destination des colis livrés, il ne lui était pas loisible d’imposer aux salariés des “transporteurs indépendants” et à ces derniers, des travaux annexes sauf accords particuliers, ni d’assurer sur ceux-ci un contrôle constant de leur activité ainsi qu’elle le faisait avec l’emploi obligatoire du lecteur optique qui, sous couvert d’un contrôle des colis, engendrait un contrôle permanent de l’activité du transporteur ; que, lors du contrôle, il a été constaté que Manuel Z..., salarié de la SARL Euro Service A..., Pascal B..., salarié de la SARL Alex, Christian C..., salarié de la société Rapid Messagerie travaillaient exclusivement pour la société Exapaq dans des conditions de dépendance et de subordination juridique

caractéristiques du contrat de travail ; qu’il est suffisamment établi par les déclarations de Geneviève D..., épouse E..., Pascal F..., Jean-Pierre A... et Jean-Pierre G..., que leurs employés affectés à la société Exapaq échappaient totalement à leur contrôle ;

qu’il est également établi que leurs employeurs officiels n’avaient aucune connaissance de leur activité réelle au point que Jean-Pierre A... déclarait que son personnel travaillant sur le site de la société Exapaq ne connaissait de lui que Ie chèque de salaire en fin de mois, que Pascal F... éprouvait les plus grandes difficultés pour rémunérer son salarié travaillant pour la société Exapaq ne connaissant pas exactement le nombre d’heures qu’il effectuait et en étant venu à une rémunération forfaitaire ;

”1 - alors qu’il se déduit tant des dispositions de droit interne que des dispositions conventionnelles que toute infraction doit être définie en des termes clairs et précis pour exclure l’arbitraire et permettre au prévenu de connaître exactement la nature et la cause de l’accusation portée contre lui ; qu’ainsi que le soutenait le demandeur dans ses conclusions, la prévention ne visait pas les personnes concernées par le prêt illicite de main-d’oeuvre, qu’il s’agisse des entreprises ou de leurs salariés et que l’arrêt qui, pour écarter cet argument péremptoire a, par un motif manifestement erroné, objecté que la prévention - qui était distincte - du chef de travail dissimulé, était quant à elle précise, n’a pas, par ce seul motif, constaté que la prévention imprécise du chef de prêt illicite de main-d’oeuvre ait permis au demandeur de se défendre et qu’en cet état, la cassation est concourue ;

”2 - alors qu’il est impossible, à nouveau, au vu des énonciations imprécises de l’arrêt, de savoir si le cas des entreprises visées dans les motifs susvisés concernent la période de la prévention antérieure ou postérieure à 1998 et si, par conséquent, ces cas mettent en cause la responsabilité pénale de Philippe Y... ou d’Olivier X...” ;

Sur le second moyen de cassation, proposé, dans les mêmes termes, pour Philippe Y... ;

Les moyens étant réunis ;

Attendu qu’il ne résulte d’aucune mention du jugement entrepris ni d’aucunes conclusions déposées que les prévenus aient invoqué, devant les premiers juges et avant toute défense au fond, l’imprécision de la prévention ;

Qu’ainsi, en application de l’article 385 du Code de procédure pénale, les moyens qui reviennent à présenter une exception de nullité des citations sont irrecevables ;

Sur le premier moyen de cassation, proposé pour Olivier X..., pris de la violation des articles 122-4 du Code pénal, L. 121-1 et suivants et L. 324-9 du Code du travail, L. 132-1 et suivants du Code de commerce (94 et suivants de l’ancien Code de commerce), 8, alinéa 2, et 34 de la loi n° 82-1153 du 30 décembre 1982, 1, 25 à 37, 41 à 43 et 51 du décret du 14 mars 1986 pris pour l’application de cette loi, 591 et 593 du Code de procédure pénale, défaut et contradiction de motifs, manque de base légale ;

”en ce que l’arrêt attaqué a déclaré Olivier X... coupable d’avoir exercé à but lucratif une activité d’entreprise de transport sans effectuer la tenue d’un livre de paie, d’un registre du personnel ni sans effectuer de déclaration préalable à l’embauche en ce qui concerne Sébastien H..., Bernard I..., Jean-Pierre J..., Michel K..., Jacques L..., Christian C... et Sébastien M..., et d’avoir, étant employeur, dissimulé des salariés, en l’espèce Sébastien H..., Michel K..., Jean-Pierre J..., Bernard I..., Jean-Luc N..., Xavier O..., Nicolas P... et Jean-Paul Q..., Hervé R... ;

”aux motifs que l’article 120-3 du Code du travail permet aux juridictions de requalifier les contrats conclus entre la société Exapaq et les artisans indépendants, personnes physiques travaillant avec elle ; qu’il convient, dès lors, d’examiner la véritable nature du contrat liant la société Exapaq avec les artisans indépendants et de rechercher si, dans les faits, au-delà des habillages juridiques, leurs relations étaient effectivement régies par un contrat de location de véhicule avec chauffeur ou par un réel contrat de sous-traitance ou s’il s’agissait de faux contrats dissimulant en fait l’exercice d’un travail dissimulé ; que l’objet social de la société Exapaq était commissionnaire de transport, service de messagerie et affrètement mis au point par le groupe Exapaq et qu’elle pouvait, en cette qualité, recourir soit au contrat de location de véhicules industriels avec chauffeur ou à la sous-traitance, conservant en principe la maîtrise du transport et engageant sa propre responsabilité vis-à-vis de sa propre clientèle ; qu’il convient de s’assurer que, dans la réalité quotidienne, les conditions dans lesqueIles les “transporteurs indépendants” exerçaient leur activité correspondaient bien au recours à de tels

contrats ; que les quelques différences entre des salariés et des transporteurs indépendants relevées par la société Exapaq ne sont pas suffisamment significatives pour permettre d’affirmer que le contrat conclu entre cette société et les “transporteurs indépendants” sont exclusives de l’existence d’un contrat de travaiI ; que dans le contrat de location de véhicules industriels avec chauffeurs, le mode de rémunération du fournisseur du véhicule avec chauffeur est l’un des éléments importants pour savoir si on se trouve face à un véritable contrat de location de véhicule avec chauffeur ; que la plupart des “transporteurs indépendants” entendus ont souligné qu’il ne pouvaient pas valablement négocier leur rémunération avec la société Exapaq ; qu’il convient de relever que les factures acquittées par la société Exapaq aux “transporteurs indépendants” travaillant pour son compte ne font pas référence au véhicule mis à sa disposition (numéro d’immatriculation, tonnage) ni à une date de mise à disposition ; que la rémunération de ces artisans comportait pour partie un forfait, pour partie une somme au nombre de colis enlevés ou ramassés voire une prime de qualité, sans référence au kilométrage parcouru, alors que l’article 13 du contrat type prévoit que le prix de la location comprend une rémunération en distinguant la mise à disposition du véhicule, la mise à disposition du personneI de conduite et le kilométrage effectué et ne doit pas être établie sur la base des quantités transportées ou du nombre de voyages effectués par le locataire ; qu’il convient également de relever que, contrairement au contrat type de location avec chauffeur qui veut que le loueur, en l’espèce l’artisan indépendant “sous-traitant, locatier ou louageur” ait la maîtrise de ce qui a trait au véhicule lui- même, à avoir la conduite, l’état, l’entretien, le choix du véhicule dans lesquels le locataire n’a aucun droit d’immixtion, la société Exapaq avait fortement incité, voire imposé aux artisans travaillant avec elle de s’équiper en véhicules de marque Mercedes ; qu’en toute hypothèse elle leur imposait d’accepter la norme D MI 17, laquelle leur faisait obligation d’utiliser un véhicule agréé par elle ; qu’elle avait établi une fiche de sanctions annexée au contrat de location de véhicule avec chauffeur prévoyant notamment des sanctions pécuniaires en cas de mauvais en retient ou de malpropreté du véhicule ; qu’elle imposait à ses cocontractants l’usage d’un lecteur optique qui servait entre autre à établir la facturation ; qu’en outre, il convient de noter, comme l’a déclaré Colette S..., que cette dernière n’hésitait pas à mettre un terme aux relations avec “les artisans indépendants sans respecter aucune forme ; qu’ainsi, en dépit des documents établis, au demeurant rédigés en termes très vagues et qui ne correspondaient pas à la réalité quotidienne, les trois prévenus ne sauraient valablement exciper du fait que les relations de la société Exapaq avec “les transporteurs indépendants” travaillant pour son compte

s’inscrivaient dans le respect absolu des contrats types de location de véhicules industriels avec chauffeur tels que prévus par la loi Loti, pour échapper à toute poursuite du chef de travail dissimulé ; qu’en effet, les relations de cette société avec les transporteurs travaillant pour son compte ne s’inscrivent pas en fait dans le cadre de ce type de contrat ; qu’il convient ensuite d’examiner si les relations de la société Exapaq avec ces “transporteurs indépendants” peuvent s’inscrire dans le cadre d’un véritable contrat de sous-traitance ou si en fait, ils étaient liés à cette société par un lien de subordination juridique caractéristique du contrat de travail ; que le contrat type de sous-traitance en matière de transport tel qu’il résulte du décret du 19 juillet 2001, comporte notamment les dispositions suivantes : - il fait interdiction à l’organisateur de transport, le plus souvent un commissionnaire de transport, de s’immiscer dans le choix des fournisseurs de biens ou de services du sous-traitant ; - l’organisateur de transport peut, avec l’accord de ce dernier, le faire bénéficier de conditions meilleures que celles qu’il pourrait avoir en agissant seul ; - il peut demander à son sous-traitant que le personnel ou le matériel de ce dernier porte ses couleurs et sa marque ou celle de ses clients ; - il doit en faire une demande écrite et prévoir en accord avec le sous-traitant, les modalités et les conditions des fournitures des tenues et du retour à l’état initial du matériel ; - il peut demander au sous-traitant de s’équiper de logiciel compatible avec ceux dont il est lui-même doté afin d’assurer la continuité de la circulation des informations nécessaires à la bonne exécution du contrat de transport ; - en tout cas, le sous-traitant a le choix de ses clients et la libre utilisation de ses moyens sans que l’opérateur de transport ne puisse s’y opposer d’une façon quelconque ; - le contrat fait mention, à titre indicatif du volume de prestations que l’opérateur de transport envisage de lui confier ; - le sous-traitant calcule ses coûts et détermine lui-même ses tarifs qu’il porte à la connaissance de l’opérateur de transport, le prix est négocié au moment de la conclusion du contrat ; qu’en aucun cas, le recours à ce contrat type ne constitue une garantie pour l’opérateur de transport de ne pas être éventuellement poursuivi pour avoir commis une infraction de travail dissimulé si, en pratique, le statut du sous-traitant ressemble par trop à celui du salarié ; qu’en l’espèce, même si la politique de la société Exapaq a varié pour devenir plus souple à partir de 1998, peut-être sous l’effet des poursuites engagées contre ses différentes agences, sont établis les fait suivants : la clientèle servie n’appartenait pas si l’on peut dire à la société Exapaq et non aux sous-traitants ; que la quasi totalité des “sous-traitants” n’était pas liée par une clause d’exclusivité, ils devaient cependant ne pas se livrer à des activités concurrentes et avaient pour seul donneur d’ordres la société Exapaq ; ils effectuaient des horaires hebdomadaires excédant généralement 50 heures sur cinq jours et la durée de la journée de travail avait une ampleur telle qu’elle leur interdisait d’avoir leur propre clientèle

et ce, à deux exceptions près dont Sébastien H... et Christophe T... qui, pour satisfaire à quelques déménagements, avaient dû travailler le dimanche ; les principales exceptions relevées ne concernaient que quelques très rares “sous-traitants” qui employaient plusieurs salariés et en mettaient certains à la totale disposition de la société Exapaq se réservant de travailler avec d’autres pour d’autres donneurs d’ordres ; la société Exapaq appliquait une politique de groupe incitant, voire imposant aux “sous-traitants” d’acquérir des camionnettes de marque Mercedes d’un type déterminé et imposait la couleur et le tonnage des véhicules pour ceux qui n’avaient pas des camionnettes Mercedes ;

l’intervention de la société Exapaq dans l’acquisition des camions même si certains transporteurs, à plus forte personnalité, avaient librement choisi leur matériel, dépassait largement le simple conseil ;

l’emprise de la société Exapaq sur les véhicules utilisés par “les sous-traitants” se traduisait notamment par la publicité faite par cette société : “plus de 600 véhicules tous identiques” ; certains véhicules ayant même été fournis par la société Exapaq elle-même ou par la même société de vente avec crédit-bail, la SA X... ; la rémunération des “sous-traitants” n’était pas librement négociée mais tenait compte d’une simulation financière établie par la société Exapaq et des exigences de cette dernière ; en fonction des barèmes de la société Exapaq, les “sous-traitants” établissaient une facturation qui dépendait pour une large part des renseignements figurant dans le lecteur optique et qui, pour certains, leur était payée à 30 ou 45 jours, la société Exapaq se constituant ainsi un complément de trésorerie ; tout au plus, les “sous-traitants” pouvaient-ils solliciter la modification du barème trop désavantageux mais la décision relevait toujours de la volonté discrétionnaire de la société Exapaq ; les “sous-traitants” étaient astreints à des horaires de prise de travail, 7 heures - 7 heures 10 et leur journée se déroulait selon “la charte de l’artisan” qui fixait même l’emplacement qu’ils devaient utiliser sur Ie quai de chargement et leur imposait d’utiliser un lecteur optique ; les horaires de retour sur le site d’Exapaq étaient strictement contrôlés et Colette S... n’avait pas hésité à mettre un terme à la collaboration avec Jacques L... aux seuls motifs qu’il revenait trop tard à l’agence de la société Exapaq perturbant le système d’exploitation informatique de cette société ; cette astreinte à des horaires précis de travail ne pouvait pas s’expliquer uniquement par les contraintes inhérentes à l’exercice d’une activité de messagerie, comme tente de le soutenir les prévenus, mais résultait surtout de l’organisation interne de la société Exapaq ainsi que Colette S... l’avait signifié à Jacques L... en lui reprochant de perturber le système d’exploitation des données informatiques de la société Exapaq ; sous la direction d’un chef de quai, salarié de la société Exapaq, les artisans transporteurs étaient tenus de se présenter sur les quais de la société Exapaq à 7 heures pour procéder au chargement des

colis lus et enregistrés au lecteur optique fourni par la société Exapaq ; un document reprenant l’ensemble de livraisons à effectuer était établi grâce au matériel d’Exapaq, ils ne pouvaient commencer leurs livraisons qu’après l’établissement de ce document puis équipés d’un appareil de lecture optique ils livraient les colis, puis procédaient au ramassage d’autres colis et établissaient un compte-rendu ; dans la publicité, la société Exapaq a pu écrire “grâce à la lecture optique, nous avons toujours votre colis à l’oeil”, ce qui implique qu’un contrôle permanent était exercé sur le “sous-traitant et que, de surcroît, la lecture de cet appareil en fin de journée permettait de contrôler le travail effectué dans la journée et d’établir la facturation et qu’ainsi, l’usage de cet appareil dépassait largement le seul souci de suivre les colis ; en définitive, la seule autonomie laissée au “sous-traitant” était celle d’organiser en la manière la plus rationnelle la tournée à lui attribuée ; cette recherche de la rationalité ne s’appréciant pas différemment selon que l’intéressé était salarié ou “sous-traitant”, les seuls objectifs étant d’éviter les pertes de temps et d’effectuer le travail confié dans le délai imparti ; les “sous-traitants” pouvaient éventuellement se faire remplacer mais uniquement dans la mesure où le remplaçant était agréé par la société Exapaq ; qu’il ne saurait être tiré aucune conséquence juridique de la relative autonomie laissée au “sous-traitant” qui, par ailleurs, se trouvait sous le contrôle permanent de son donneur d’ordres ; qu’ainsi, la pratique quotidienne de la société Exapaq à l’égard de ses “ sous-traitants” ne correspond pas aux exigences du contrat type de “sous-traitance” invoqué ni dans le mode de calcul de la rémunération, ni dans l’autonomie du “sous-traitant” dans le choix de ses moyens de travail ; que l’analyse des relations existant entre la société Exapaq Auvergne et les transporteurs travaillant pour son compte démontrent que ceux-ci étaient placés dans un lien de subordination juridique permanent et de dépendance économique absolue, ces artisans étant à la totale merci de leur unique donneur d’ouvrage et ne tirant qu’une rémunération modeste pouvant aller de 1067 euros à 1524 euros pour une activité les conduisant à effectuer plus de 50 heures pas semaine ; qu’ainsi, les prétendus artisans indépendants auxquels la société Exapaq avait recours étaient en réalité des salariés ;

”1 - alors que la rédaction de la prévention visant des travailleurs dissimulés précis imposant aux juges de constater l’existence du délit au regard de la situation de chacun des artisans, les motifs généraux de l’arrêt ne peuvent suffire à eux seuls à justifier la décision de condamnation du chef de recours à des travailleurs dissimulés à l’encontre du demandeur ;

”2 - alors qu’il résulte expressément des énonciations de l’arrêt que Sébastien H... disposait, d’une part, d’une certaine liberté dans son emploi du temps puisqu’il effectuait des déménagements pour le compte de clients personnels et, d’autre part, des marges de discussion importantes par rapport à la société Exapaq puisqu’il avait refusé, sans que cela ait entraîné la rupture de son contrat, d’avoir un camion de marque Mercedes aux couleurs de cette société et qu’en cet état, la cour d’appel, qui, au demeurant, ne s’est expliquée ni sur le contenu du contrat qui liait cet artisan à la société Exapaq, ni sur les conditions dans lesquelles il avait été négocié, ni sur la facturation qu’il établissait, n’a pas, abstraction faite de motifs insuffisants et contradictoires, caractérisé l’existence d’un lien de subordination entre lui et la société Exapaq ;

”3 - alors que les énonciations de l’arrêt d’où il résulte tantôt que la société Exapaq avait imposé à son sous-traitant, Nicolas P..., ses conditions de rémunération, tantôt qu’elle avait acquiescé à l’offre de celui-ci, ne permettent pas à la Cour de Cassation d’exercer son contrôle sur la décision de l’arrêt de requalifier le contrat de ce sous-traitant en contrat de travail ;

”4 - alors que, dans ses conclusions régulièrement déposées devant la cour d’appel, le demandeur faisait valoir qu’il résultait des déclarations de Jean-Pierre J... que le représentant de la société Exapaq lui avait laissé le choix entre le statut de salarié et celui de sous-traitant et que l’artisan avait librement opté pour le statut de sous-traitant et que l’arrêt qui, sans répondre à ce chef de conclusions péremptoires d’où il résultait qu’il y avait eu une véritable négociation entre partenaires économiques discutant à égalité des négociations excluant par elles-mêmes toute subordination juridique, a cru pouvoir requalifier le contrat de sous-traitance de Jean-Pierre J... en contrat de travail, a privé sa décision de base légale ;

”5 - alors que la cour d’appel ne pouvait, sans contredire les déclarations de Bernard I... (D 11), expressément invoquées dans ses conclusions régulièrement déposées, d’où il résultait que cet artisan “travaillait pour son propre compte”, requalifier le contrat de sous-traitance passé entre lui et la société Exapaq en contrat de travail ;

”6 - alors qu’il est impossible, au vu des seules constatations de l’arrêt, de déterminer les conditions dans lesquelles Gilles U... avait contracté avec la société Exapaq les clauses de son contrat non plus que les conditions de la rémunération de cet artisan et qu’ainsi, la requalification de son contrat en contrat de travail repose sur une insuffisance de motifs manifeste ;

”7 - alors que la cour d’appel, qui ne s’est expliquée ni sur les conditions dans lesquelles Christian C... avait contracté avec la société Exapaq, ni sur le contenu de son contrat, ni sur le mode de calcul de sa rémunération et qui a constaté que la société Exapaq avait laissé cet artisan libre de sous-traiter une partie du travail qu’elle lui avait confié, n’a pas, abstraction faite de motifs insuffisants et contradictoires, justifié sa décision de considérer celui-ci comme un travailleur salarié dissimulé ;

”8 - alors que la cour d’appel qui, après avoir constaté que Sébastien M... avait conclu un contrat de location de véhicule avec conducteur, s’est bornée à énoncer que ce contrat est accompagné d’une convention tarifaire de rémunération sans préciser les bases de cette rémunération, n’a pas légalement justifié la requalification de ce contrat en contrat de travail ;

”9 - alors que la cour d’appel, qui ne s’est pas expliquée sur le contenu des obligations liant Jean-Luc N... à la société Exapaq ni sur les conditions de rémunération de cet artisan, n’a pas légalement justifié sa décision” ;

Sur le premier moyen de cassation, proposé pour Philippe Y..., pris de la violation des articles 122-4 du Code pénal, L. 121-1 et suivants et L. 324-9 du Code du travail, L. 132-1 et suivants du Code de commerce (94 et suivants de l’ancien Code de commerce), 8, alinéa 2, et 34 de la loi n° 82-1153 du 30 décembre 1982, 1, 25 à 37, 41 à 43 et 51 du décret du 14 mars 1986 pris pour l’application de cette loi, 591 et 593 du Code de procédure pénale, défaut et contradiction de motifs, manque de base légale ;

”en ce que l’arrêt attaqué a déclaré Philippe Y... coupable d’avoir, étant employeur, dissimulé des salariés en l’espèce Christophe T..., Sébastien H..., Nicolas P..., Michel K..., Jean-Pierre J..., Bernard I..., Gilles U..., Christian C..., Hervé R..., Dominique V... et Joël XW... ;

”aux motifs que l’article 120-3 du Code du travail permet aux juridictions de requalifier les contrats conclus entre la société Exapaq et les artisans indépendants, personnes physiques travaillant avec elle ; qu’il convient, dès lors, d’examiner la véritable nature du contrat liant la société Exapaq avec les artisans indépendants et de rechercher si, dans les faits, au-delà des habillages juridiques, leurs relations étaient effectivement régies par un contrat de location de véhicule avec chauffeur ou par un réel contrat de sous-traitance ou s’il s’agissait de faux contrats dissimulant en fait l’exercice d’un travail dissimulé ; que l’objet social de la société Exapaq était commissionnaire de transport, service de messagerie et affrètement mis au point par le groupe Exapaq et qu’elle pouvait, en cette qualité, recourir soit au contrat de location de véhicules industriels avec chauffeur ou à la sous-traitance, conservant en principe la maîtrise du transport et engageant sa propre responsabilité vis-à-vis de sa propre clientèle ; qu’il convient de s’assurer que, dans la réalité quotidienne, les conditions dans lesqueIles les “transporteurs indépendants” exerçaient leur activité correspondaient bien au recours à de tels contrats ; que les quelques différences entre des salariés et des transporteurs indépendants relevées par la société Exapaq ne sont pas suffisamment significatives pour permettre d’affirmer que le contrat conclu entre cette société et les “transporteurs indépendants” sont exclusives de l’existence d’un contrat de travaiI ; que dans le contrat de location de véhicules industriels avec chauffeurs, le mode de rémunération du fournisseur du véhicule avec chauffeur est l’un des éléments importants pour savoir si on se trouve face à un véritable contrat de location de véhicule avec chauffeur ; que la plupart des “transporteurs indépendants” entendus ont souligné qu’il ne pouvaient pas valablement négocier leur rémunération avec la société Exapaq ; qu’il convient de relever que les factures acquittées par la société Exapaq aux “transporteurs indépendants” travaillant pour son compte ne font pas référence au véhicule mis à sa disposition (numéro d’immatriculation, tonnage) ni à une date de mise à disposition ; que la rémunération de ces artisans comportait pour partie un forfait, pour partie une somme au nombre de colis enlevés ou ramassés voire une prime de qualité, sans référence au kilométrage parcouru, alors que l’article 13 du contrat type prévoit que le prix de la location comprend une rémunération en distinguant la mise à disposition du véhicule, la mise à disposition du personneI

de conduite et le kilométrage effectué et ne doit pas être établie sur la base des quantités transportées ou du nombre de voyages effectués par le locataire ; qu’il convient également de relever que, contrairement au contrat type de location avec chauffeur qui veut que le loueur, en l’espèce l’artisan indépendant “sous-traitant, locatier ou louageur” ait la maîtrise de ce qui a trait au véhicule lui-même, à avoir la conduite, l’état, l’entretien, le choix du véhicule dans lesquels le locataire n’a aucun droit d’immixtion, la société Exapaq avait fortement incité, voire imposé aux artisans travaillant avec elle de s’équiper en véhicules de marque Mercedes ; qu’en toute hypothèse elle leur imposait d’accepter la norme D MI 17, laquelle leur faisait obligation d’utiliser un véhicule agréé par elle ; qu’elle avait établi une fiche de sanctions annexée au contrat de location de véhicule avec chauffeur prévoyant notamment des sanctions pécuniaires en cas de mauvais en retient ou de malpropreté du véhicule ; qu’elle imposait à ses cocontractants l’usage d’un lecteur optique qui servait entre autre à établir la facturation ; qu’en outre, il convient de noter, comme l’a déclaré Colette S..., que cette dernière n’hésitait pas à mettre un terme aux relations avec “les artisans indépendants sans respecter aucune forme ; qu’ainsi, en dépit des documents établis, au demeurant rédigés en termes très vagues et qui ne correspondaient pas à la réalité quotidienne, les trois prévenus ne sauraient valablement exciper du fait que les relations de la société Exapaq avec “les transporteurs indépendants” travaillant pour son compte s’inscrivaient dans le respect absolu des contrats types de location de véhicules industriels avec chauffeur tels que prévus par la loi Loti, pour échapper à toute poursuite du chef de travail dissimulé ; qu’en effet, les relations de cette société avec les transporteurs travaillant pour son compte ne s’inscrivent pas en fait dans le cadre de ce type de contrat ; qu’il convient ensuite d’examiner si les relations de la société Exapaq avec ces “transporteurs indépendants” peuvent s’inscrire dans le cadre d’un véritable contrat de sous-traitance ou si en fait, ils étaient liés à cette société par un lien de subordination juridique caractéristique du contrat de travail ; que le contrat type de sous-traitance en matière de transport tel qu’il résulte du décret du 19 juillet 2001, comporte notamment les dispositions suivantes : - il fait interdiction à l’organisateur de transport, le plus souvent un commissionnaire de transport, de s’immiscer dans le choix des fournisseurs de biens ou de services du sous-traitant ; - l’organisateur de transport peut, avec l’accord de ce dernier, le faire bénéficier de conditions meilleures que celles qu’il pourrait avoir en agissant seul ; - il peut demander à son sous-traitant que le personnel ou le matériel de ce dernier porte ses couleurs et sa marque ou celle de ses clients ; - il doit en faire une demande écrite et prévoir en accord avec le sous-traitant, les modalités et les conditions des fournitures des tenues et du retour à

l’état initial du matériel ; - il peut demander au sous-traitant de s’équiper de logiciel compatible avec ceux dont il est lui-même doté afin d’assurer la continuité de la circulation des informations nécessaires à la bonne exécution du contrat de transport ; - en tout cas, le sous-traitant a le choix de ses clients et la libre utilisation de ses moyens sans que l’opérateur de transport ne puisse s’y opposer d’une façon quelconque ; - le contrat fait mention, à titre indicatif, du volume de prestations que l’opérateur de transport envisage de lui confier ; - le sous-traitant calcule ses coûts et détermine lui-même ses tarifs qu’il porte à la connaissance de l’opérateur de transport, le prix est négocié au moment de la conclusion du contrat ; qu’en aucun cas, le recours à ce contrat type ne constitue une garantie pour l’opérateur de transport de ne pas être éventuellement poursuivi pour avoir commis une infraction de travail dissimulé si, en pratique, le statut du sous-traitant ressemble par trop à celui du salarié ; qu’en l’espèce, même si la politique de la société Exapaq a varié pour devenir plus souple à partir de 1998, peut-être sous l’effet des poursuites engagées contre ses différentes agences, sont établis les fait suivants : la clientèle servie n’appartenait pas si l’on peut dire à la société Exapaq et non aux sous-traitants ; que la quasi totalité des “sous-traitants” n’était pas liée par une clause d’exclusivité, ils devaient cependant ne pas se livrer à des activités concurrentes et avaient pour seul donneur d’ordres la société Exapaq ; ils effectuaient des horaires hebdomadaires excédant généralement 50 heures sur cinq jours et la durée de la journée de travail avait une ampleur telle qu’elle leur interdisait d’avoir leur propre clientèle et ce, à deux exceptions près dont Sébastien H... et Christophe T... qui, pour satisfaire à quelques déménagements, avaient dû travailler le dimanche ; les principales exceptions relevées ne concernaient que quelques très rares “sous-traitants” qui employaient plusieurs salariés et en mettaient certains à la totale disposition de la société Exapaq se réservant de travailler avec d’autres pour d’autres donneurs d’ordres ; la société Exapaq appliquait une politique de groupe incitant, voire imposant aux “sous-traitants” d’acquérir des camionnettes de marque Mercedes d’un type déterminé et imposait la couleur et le tonnage des véhicules pour ceux qui n’avaient pas des camionnettes Mercedes ;

l’intervention de la société Exapaq dans l’acquisition des camions même si certains transporteurs, à plus forte personnalité, avaient librement choisi leur matériel, dépassait largement le simple conseil ;

l’emprise de la société Exapaq sur les véhicules utilisés par “les sous-traitants” se traduisait notamment par la publicité faite par cette société : “plus de 600 véhicules tous identiques” ; certains véhicules ayant même été fournis par la société Exapaq elle-même ou par la même société de vente avec crédit-bail, la SA X... ; la rémunération des “sous-traitants” n’était pas librement négociée mais tenait compte d’une simulation financière établie par la société Exapaq et des exigences de cette dernière ; en fonction des barèmes de la société Exapaq, les “sous-traitants” établissaient une facturation qui dépendait pour une large part des renseignements figurant dans le lecteur optique et qui, pour certains, leur était payée à 30 ou 45 jours, la société Exapaq se constituant ainsi un complément de trésorerie ; tout au plus, les “sous-traitants” pouvaient-ils solliciter la modification du barème trop désavantageux mais la décision relevait toujours de la volonté discrétionnaire de la société Exapaq ; les “sous-traitants” étaient astreints à des horaires de prise de travail, 7 heures - 7 heures 10 et leur journée se déroulait selon “la charte de l’artisan” qui fixait même l’emplacement qu’ils devaient utiliser sur Ie quai de chargement et leur imposait d’utiliser un lecteur optique ; les horaires de retour sur le site d’Exapaq étaient strictement contrôlés et Colette S... n’avait pas hésité à mettre un terme à la collaboration avec Jacques L... aux seuls motifs qu’il revenait trop tard à l’agence de la société Exapaq perturbant le système d’exploitation informatique de cette société ; cette astreinte à des horaires précis de travail ne pouvait pas s’expliquer uniquement par les contraintes inhérentes à l’exercice d’une activité de messagerie, comme tente de le soutenir les prévenus, mais résultait surtout de l’organisation interne de la société Exapaq ainsi que Colette S... l’avait signifié à Jacques L... en lui reprochant de perturber le système d’exploitation des données informatiques de la société Exapaq ; sous la direction d’un chef de quai, salarié de la société Exapaq, les artisans transporteurs étaient tenus de se présenter sur les quais de la société Exapaq à 7 heures pour procéder au chargement des colis lus et enregistrés au lecteur optique fourni par la société Exapaq ; un document reprenant l’ensemble de livraisons à effectuer était établi grâce au matériel d’Exapaq, ils ne pouvaient commencer leurs livraisons qu’après l’établissement de ce document puis équipés d’un appareil de lecture optique ils livraient les colis, puis procédaient au ramassage d’autres colis et établissaient un compte-rendu ; dans la publicité, la société Exapaq a pu écrire “grâce à la lecture optique, nous avons toujours votre colis à l’oeil”, ce qui implique qu’un contrôle permanent était exercé sur le “sous-traitant et que, de surcroît, la lecture de cet appareil en fin de journée permettait de contrôler le travail effectué dans la journée et d’établir la facturation et qu’ainsi, l’usage de cet

appareil dépassait largement le seul souci de suivre les colis ; en définitive, la seule autonomie laissée au “sous-traitant” était celle d’organiser en la manière la plus rationnelle la tournée à lui attribuée ; cette recherche de la rationalité ne s’appréciant pas différemment selon que l’intéressé était salarié ou “sous-traitant”, les seuls objectifs étant d’éviter les pertes de temps et d’effectuer le travail confié dans le délai imparti ; les “sous-traitants” pouvaient éventuellement se faire remplacer mais uniquement dans la mesure où le remplaçant était agréé par la société Exapaq ; qu’il ne saurait être tiré aucune conséquence juridique de la relative autonomie laissée au “sous-traitant” qui, par ailleurs, se trouvait sous le contrôle permanent de son donneur d’ordres ; qu’ainsi, la pratique quotidienne de la société Exapaq à l’égard de ses “ sous-traitants” ne correspond pas aux exigences du contrat type de “sous-traitance” invoqué ni dans le mode de calcul de la rémunération, ni dans l’autonomie du “sous-traitant” dans le choix de ses moyens de travail ; que l’analyse des relations existant entre la société Exapaq Auvergne et les transporteurs travaillant pour son compte démontrent que ceux-ci étaient placés dans un lien de subordination juridique permanent et de dépendance économique absolue, ces artisans étant à la totale merci de leur unique donneur d’ouvrage et ne tirant qu’une rémunération modeste pouvant aller de 1067 euros à 1524 euros pour une activité les conduisant à effectuer plus de 50 heures pas semaine ; qu’ainsi, les prétendus artisans indépendants auxquels la société Exapaq avait recours étaient en réalité des salariés ;

”1 - alors que la cour d’appel, qui constatait expressément qu’à partir de 1998, date de l’entrée de Philippe Y... dans la société Exapaq, la politique de cette société s’était assouplie “peut-être sous l’effet des poursuites engagées contre ses différentes agences” et qui, au-delà de la généralité de ses constatations ne distinguant pas la gestion des contrats de sous- traitance antérieurement à l’arrivée de Philippe Y... et la gestion de ces contrats postérieurement à cette arrivée, ne s’est pas expliquée sur les modalités de cet assouplissement, n’a pas légalement justifié sa décision de condamnation à l’encontre de Philippe Y... ;

”2 - alors que la rédaction de la prévention visant des travailleurs dissimulés précis imposant aux juges de constater l’existence du délit au regard de la situation de chacun des artisans, les motifs généraux de l’arrêt ne peuvent suffire à eux seuls à justifier la décision de condamnation du chef de recours à des travailleurs dissimulés à l’encontre du demandeur ;

”3 - alors qu’il résulte des constatations de l’arrêt et des pièces de la procédure (D 27, D 28) expressément invoquées dans les conclusions de Philippe Y..., que les rapports entre la société Exapaq et Christophe T... excluaient tout lien de subordination entre ladite société et cet artisan ; qu’en effet, d’une part, la rémunération de celui-ci, qui s’est toujours considéré comme un travailleur indépendant, avait été fixée sur sa proposition, la société Exapaq s’étant bornée quant à elle à l’accepter, d’autre part, Christophe T... était libre de travailler avec d’autres donneurs d’ordres, enfin son camion ne comportait pas de publicité Exapaq et que, dès lors, en requalifiant le contrat qui le liait avec la société Exapaq en contrat de travail, la cour d’appel a méconnu les articles L. 121-1 et suivants du Code du travail ;

”4 - alors qu’il résulte expressément des énonciations de l’arrêt que Sébastien H... disposait, d’une part, d’une certaine liberté dans son emploi du temps puisqu’il effectuait des déménagements pour le compte de clients personnels et, d’autre part, des marges de discussion importantes par rapport à la société Exapaq puisqu’il avait refusé, sans que cela ait entraîné la rupture de son contrat, d’avoir un camion de marque Mercedes aux couleurs de cette société et qu’en cet état, la cour d’appel, qui, au demeurant, ne s’est expliquée ni sur le contenu du contrat qui liait cet artisan à la société Exapaq, ni sur les conditions dans lesquelles il avait été négocié, ni sur la facturation qu’il établissait, n’a pas, abstraction faite de motifs insuffisants et contradictoires, caractérisé l’existence d’un lien de subordination entre lui et la société Exapaq ;

”5 - alors que les énonciations de l’arrêt d’où il résulte tantôt que la société Exapaq avait imposé à son sous-traitant, Nicolas P... ses conditions de rémunération, tantôt qu’elle avait acquiescé à l’offre de celui-ci, ne permettent pas à la Cour de Cassation d’exercer son contrôle sur la décision de l’arrêt de requalifier Ie contrat de ce sous-traitant en contrat de travail ;

”6 - alors que, dans ses conclusions régulièrement déposées devant la cour d’appel, le demandeur faisait valoir qu’il résultait des déclarations de Jean-Pierre J... que le représentant de la société Exapaq lui avait laissé le choix entre le statut de salarié et celui de sous-traitant et que l’artisan avait librement opté pour Ie statut de sous-traitant et que l’arrêt, qui, sans répondre à ce chef de conclusions péremptoire d’où il résultait qu’il y avait eu une véritable négociation entre partenaires économiques discutant à égalité des négociations excluant par elles-mêmes toute subordination juridique, a cru pouvoir requalifier le contrat de sous-traitance de Jean-Pierre J... en contrat de travail, a privé sa décision de base légale ;

”7 - alors que la cour d’appel ne pouvait, sans contredire les déclarations de Bernard I... (D 11), expressément invoquées dans ses conclusions régulièrement déposées, d’où il résultait que cet artisan “travaillait pour son propre compte”, requalifier le contrat de sous-traitance passé entre lui et la société Exapaq en contrat de travail ;

”8 - alors qu’il est impossible, au vu des seules constatations de l’arrêt, de déterminer les conditions dans lesquelles Gilles U... avait contracté avec la société Exapaq les clauses de son contrat non plus que les conditions de la rémunération de cet artisan et qu’ainsi la requalification de son contrat en contrat de travail repose sur une insuffisance de motifs manifeste ;

”9 - alors que la cour d’appel, qui ne s’est expliquée ni sur Ies conditions dans lesquelles Christian C... avait contracté avec la société Exapaq, ni sur le contenu de son contrat, ni sur le mode de calcul de sa rémunération et qui a constaté que la société Exapaq avait laissé cet artisan libre de sous-traiter une partie du travail qu’elle lui avait confié, n’a pas, abstraction faite de motifs insuffisants et contradictoires, justifié sa décision de considérer celui-ci comme un travailleur salarié dissimulé ;

”10 - alors que l’arrêt, qui a constaté qu’Hervé R... ne travaillait qu’épisodiquement pour la société Exapaq qui n’a pas précisé les conditions de rémunération de cet artisan, n’a pas, abstraction faite de motifs insuffisants, justifié sa décision de requalifier le contrat de sous-traitance liant cet artisan à la société Exapaq en contrat de travail ;

”11 - alors qu’il résulte des propres déclarations de Joël XW... (D 28), expressément invoquées par Philippe Y... dans ses conclusions, que cet artisan avait fait une proposition tarifaire renouvelable tous les ans à la société Exapaq, laquelle l’avait acceptée, et qu’en omettant de s’expliquer sur la portée de cette déclaration, incompatible avec son affirmation selon laquelle “les conditions tarifaires étaient imposées sous la contrainte”, la cour d’appel a privé sa décision de base légale ;

”12 - alors que tout arrêt rendu en matière correctionnelle doit reposer sur des constatations suffisantes étayées par des preuves et que la cour d’appel qui constatait expressément dans sa décision que Dominique V... avait pu être entendu, ne pouvait, compte tenu des éléments lacunaires dont elle disposait relativement aux conditions dans lesquelles cet artisan travaillait ave la société Exapaq, déclarer que Philippe Y... était employeur dissimulé de celui-ci” ;

Les moyens étant réunis ;

Attendu que les énonciations de l’arrêt attaqué mettent la Cour de Cassation en mesure de s’assurer que la cour d’appel a, sans insuffisance ni contradiction, répondu aux chefs péremptoires des conclusions dont elle était saisie et caractérisé en tous ses éléments, tant matériels qu’intentionnel, le délit don elle a déclaré les prévenus coupables, et a ainsi, justifié l’allocation, au profit des parties civiles, de l’indemnité propre à réparer le préjudice en découlant ;

D’où il suit que les moyens, qui se bornent à remettre en question l’appréciation souveraine, par les juges du fond, des faits et circonstances de la cause, ainsi que des éléments de preuve contradictoirement débattus, ne sauraient être admis ;

Et attendu que l’arrêt est régulier en la forme ;

REJETTE le pourvoi ;

Ainsi jugé et prononcé par la Cour de Cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;

Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l’article L.131-6, alinéa 4, du Code de l’organisation judiciaire : M. Cotte président, Mme Anzani conseiller rapporteur, M. Joly conseiller de la chambre ;

Greffier de chambre : Mme Daudé ;

En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;

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Décision attaquée : cour d’appel de RIOM, chambre correctionnelle du 29 mai 2002